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À Odessa, le candidat du « Bloc Petro Poroshenko », Alexandre Bovorik, se serait incliné face au maire sortant, Guennadi Trukhanov. Plaidant pour la réforme d’une ville célèbre pour sa corruption et la puissance de ses groupes criminels, Bovorik, qui n’est pas originaire d’Odessa, s’est opposé à un candidat local et particulièrement familier des rouages politiques de la région. Face à lui, l’ancien étudiant d’Harvard a cherché à séduire la jeunesse avec une campagne à l’occidentale, axée sur le développement technologique et la lutte contre la corruption. Une différence de style qui n’a pas suffi : si les comptages de bulletins sont toujours en cours, l’ONG ukrainienne « Comité des Electeurs d’Ukraine » affirme que Trukhanov dispose de plus de 51 % des voix et qu’il ne devrait donc pas y avoir de deuxième tour.
Bons résultats de l’opposition, mais pas de déferlante
D’après les premiers résultats, ces élections devraient voir plusieurs candidats de l’opposition s’emparer de grandes villes du pays, notamment dans les régions de l’Est et du Sud. Outre Trukhanov qui se présentait sous son propre parti à Odessa, mais se trouve historiquement proche de l’opposition, Gennadi Kernes a été élu dès le premier tour à Kharkiv avec près de 59 % des voix. Kernes était l’un des principaux soutiens du président déchu Viktor Yanoukovitch, soutien qui lui avait valu de brièvement s’exiler en Russie en février 2014. Le deuxième tour sera serré à Dniepropetrovsk, entre le candidat du parti patriote Oukrop, crédité pour l’instant de 41 % des voix, et celui de l’opposition avec 32 %.
Aucun parti n’est néanmoins parvenu à s’emparer d’une majorité de municipalités, comme cela avait pu être le cas pour le Parti des régions en 2010. Le candidat du parti du président Poroshenko, Viktor Klitshko, est en tête à Kiev mais devra passer par un deuxième tour. Dans la ville de Lviv, à l’Ouest du pays, le maire sortant et leader du parti réformiste « Samopomich », Andri Sadovy, devrait remporter la victoire : les sondages de sortie des urnes le créditent pour l’instant de 45 % des voix.
Fraude et problèmes dans l’Est
Le scrutin a été marqué par l’annulation du vote à Marioupol, principale ville de l’oblast de Donetsk encore sous contrôle ukrainien. La veille du vote, des membres de la commission électorale locale se sont plaints d’erreurs sur les bulletins, dénonçant notamment le fait qu’ils aient été imprimés par une société possédée par l’oligarque Rinat Akhemetov. Après plusieurs heures de confusion, la commission électorale a finalement décidé d’annuler le vote.
Ce même problème d’impression des bulletins de vote a aussi conduit à l’annulation du vote dans la ville de Krasnoarmeïsk. Plusieurs membres de l’opposition ont critiqué la décision, affirmant que l’annulation du scrutin visait à empêcher une défaite du parti de la majorité. « Plus de 300 000 électeurs n’ont pas pu exercer leur droit constitutionnel parce que les autorités ont décidé de masquer leur impopularité en perturbant les élections » a déclaré le Bloc d’opposition dans un communiqué.
Au-delà de ces incidents, le scrutin a été entaché de fraudes diverses à travers tout le pays. L’ONG ukrainienne OPORA a ainsi recensé près de 1 100 violations de la loi électorale, allant des simples affiches électorales installées après la fin de la campagne jusqu’aux « carrousels de votants », en passant par des achats de vote. Globalement, l’OSCE, qui surveillait le scrutin avec près de 500 observateurs, considère tout de même que les élections ont été « compétitives, bien organisées et respectant le processus démocratique », d'après une déclaration de l’organisation dans une conférence de presse tenue le 26 octobre.
Décentralisation et luttes politiques
Ces élections se déroulent alors que le gouvernement tente de faire voter une loi de décentralisation qui offrirait aux autorités locales des pouvoirs inédits dans l’histoire de l’Ukraine indépendante. Mais la désaffection croissante à laquelle fait face le gouvernement rend la possibilité d'un blocage parlementaire de plus en plus réelle. Ces élections locales représentaient donc un test de popularité pour le président Petro Poroshenko, qui pourrait de fait être affaibli par une participation peu élevée (46,5 % à l’échelle nationale, autour de 35 % dans certaines régions de l’Est et du Sud) ainsi que par les bons résultats de candidats de l’opposition.